Gestion de crise en EHPAD : en quoi consiste le “plan bleu” ?

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Les établissements d’hébergement pour personnes âgées sont susceptibles de faire face à des crises et autres situations exceptionnelles, pouvant impacter fortement leurs activités. Qu’il s’agisse de pandémies, de menaces terroristes, ou encore d’évènements climatiques, chaque structure doit être en mesure de se préparer. C’est là que réside tout l’intérêt du “plan bleu”, qui vient renforcer le dispositif de gestion des risques des établissements concernés.

 

Selon l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), la canicule de 2003 a généré un excédent de décès estimé globalement à 15 300 cas environ (+ 50 %). Cette surmortalité a été plus marquée chez les personnes de plus de 75 ans (+ 60 %). Un rapport du Sénat indique que certains facteurs ont pu avoir une influence sur cette situation inhabituelle. Il s’agissait notamment du mode de logement et d'hébergement des personnes âgées, et de l'isolement médical, social ou familial des victimes.

 

Si l’obligation de disposer de systèmes fixes de rafraîchissement de l'air ou de climatiseurs mobiles relève d’un aspect limité et correctif, des mesures plus systémiques ont vu le jour, en mettant l’accent sur le domaine préventif. C’est ainsi que le décret cité ci-dessus impose l'intégration dans les projets d'établissement d’un plan détaillant les modalités d'organisation à mettre en œuvre en cas de crise sanitaire ou climatique. Un arrêté du 7 juillet 2005 donne sa dénomination officielle à ce plan qui sera donc intitulé “ plan bleu ”.

 

Cette appellation “ colorée ” semble faire écho au plan blanc, intégré au Code de la santé, publique afin que les établissements de santé puissent mobiliser les moyens dont il dispose, en cas d'afflux de patients ou de victimes ou pour faire face à une situation sanitaire exceptionnelle.

 

Ces mesures s’intègrent désormais dans le dispositif ORSAN (Organisation de la Réponse du système de santé en situations Sanitaires exceptionnelles) qui n’est pas sans rappeler le dispositif antérieur ORSEC (Organisation de la Réponse de Sécurité Civile) et son ancien plan rouge destiné à porter secours à de nombreuses victimes, débaptisé en 2005.

 

Pourquoi attacher une importance particulière à l’élaboration de ce plan ? Comment le construire de manière pratique ? Quelles aides rechercher ?

On vous apporte des éléments de réponse.



Pourquoi un plan spécifique ?

 

Ainsi, pour les établissements accueillant des personnes âgées, un événement climatique a été le révélateur de la nécessité d’anticiper les situations de crise pour être prêt à les affronter. Il fallait donc un plan global de gestion des risques pour faire face à tout type de crises et de situations sanitaires exceptionnelles susceptibles de bouleverser les modes de fonctionnement habituels. L’objectif principal est clair : il s’agit de garantir la sécurité des résidents et des personnels, tout en préservant autant que faire se peut un fonctionnement proche de la normale.

 

L’approche retenue se devait donc d’être à la fois spécifique, en concevant un outil généraliste et méthodique, mais aussi potentiellement spécialisé en s’adaptant à des formes de risques connus ou émergents (épidémies, rupture de flux, incendie, infections nosocomiales, actes de malveillance et de terrorisme, catastrophes naturelles et technologiques, etc.).

 

La méthodologie sera familière pour un responsable QHSE, sûrement beaucoup moins pour des personnels non initiés. L’un des enjeux pour rendre le plan parfaitement opérationnel est donc de sensibiliser et de former les agents chargés de sa mise en œuvre et, idéalement, de les associer à son élaboration.

 

Le plan bleu se veut aussi cohérent avec d’autres dispositions de gestion de crise existant, quel que soit l’échelon territorial retenu, et en lien avec les autorités locales et celles de tutelle. Il s’agit principalement des préfectures, des mairies, des conseils départementaux, des ARS. Un lien formel avec une offre de soins globale est présent, que ce soit le secteur hospitalier ou bien la médecine de ville, sur la base d’une approche coopérative. Les autres mesures complémentaires citées sont par exemple celles concernant :

 

  • La sécurité en cas de défaillance de sources d’énergie (notamment électrique)
  • La gestion du risque infectieux
  • Les systèmes de management de la continuité d’activité
  • La prévention des risques de brûlure par eau chaude sanitaire et de légionellose
  • Les mesures de sécurisation dans les établissements (sécurité des personnes et des biens)

 

Ces différents éléments ne revêtent pas en général un caractère réglementaire mais ont plutôt la forme d’instructions ministérielles ou de lignes directrices.

 

Le plan bleu, plan de gestion de crise spécifique a pour but :

 

  • d’identifier les risques de toutes natures ;
  • de prévoir les actions nécessaires et leur mise en oeuvre pour garantir la prise en charge des résidents ;
  • de concevoir des modalités d’alerte, preuves de réactivité.

 

La résilience est ainsi visée au travers d’une démarche de planification et d'anticipation.

 

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Comment élaborer ce plan ?

 

Se préparer à affronter des crises, combien même leur occurrence serait faible, passe par l'élaboration de plans. La survenue récente d’événements jugés auparavant comme improbables peut d’ailleurs amener à réviser certaines probabilités et donc certaines criticités.

 

Il ne faut pas perdre de vue que c’est la notion de planification qui est importante, c'est-à-dire, au-delà du plan lui-même en tant que document, l’organisation temporelle de l’atteinte d’objectifs. Eisenhower et Churchill ont ainsi affirmé respectivement “ les plans sont inutiles mais la planification est indispensable “, et “ les plans importent peu, mais la planification est essentielle.” Des affirmations que Henry Laurence Gantt (1861-1919), concepteur du diagramme portant son nom, n’aurait pas reniées !

 

Afin d’accompagner les équipes chargées de l’élaboration des plans bleus, le ministère de la santé et de la prévention a diffusé un guide national. Celui-ci détermine cinq étapes principales de réalisation des plans, au travers d’une méthodologie, qui n’est pas sans rappeler les préceptes de la norme ISO 31 000 :

 

Etape 1 : Constituer une équipe

 

Indépendamment de la désignation obligatoire d’un " référent “ en cas de déclenchement du plan, il s’agit ici de la constitution d’une véritable équipe projet afin de construire le document, mais aussi de le réviser et de l’actualiser au fil du temps. Toutes les ressources jugées utiles et nécessaires (parties prenantes) peuvent être associées, y compris au sein des familles et des résidents. La mission comprend également l'organisation d’exercices pour tester l’opérationnalité des mesures arrêtées.

 

Etape 2 : Répertorier et analyser les risques

 

En s’appuyant sur les documents existants qui répertorient déjà les risques internes ou externes, leur cartographie est établie. Une hiérarchisation et des priorités peuvent intervenir.

 

Etape 3 : Évaluer et prévoir les ressources nécessaires

 

Cette étape consiste à lister les capacités de réponse existantes et de mesurer d'éventuels non conformités ou des écarts entre les besoins et les ressources présentes (humaines, matérielles, …).

 

Etape 4 : Organiser la réponse aux situations de crise

 

Trois éléments structurent cette réponse:

 

  • les modalités de déclenchement des alertes
  • la mise en place d'une cellule de crise
  • la mise à disposition d’outils de gestion de crise, réactifs car préparés

 

Etape 5 : S’entraîner et capitaliser les expériences

 

Il doit être prévu:

 

  • un plan de formation des personnels
  • un programme annuel d’exercices
  • une forte incitation à l’usage du RETEX

 

Il est aussi essentiel de se souvenir qu’une situation de crise exceptionnelle s’accompagne bien souvent d’un amenuisement des ressources habituelles (personnels, sources d’énergie, fournitures, systèmes d’information, …). Un mode dégradé devra donc toujours être envisagé a priori.

 

Des aides pour bâtir un plan opérationnel

 

Les dimensionnements différents des établissements, leur culture du risque et les ressources disponibles ont une influence directe sur la capacité à se conformer aux exigences d’élaboration et de mise en œuvre d’un plan bleu. Selon ces diverses situations, il peut donc être nécessaire de recourir à des aides pour bénéficier de conseils et d’appuis méthodologiques. Le premier réflexe sera de s’appuyer sur le guide national édition 2022, cité dans le paragraphe précédent.

 

Les autres accompagnements possibles sont essentiellement constitués par les ARS et par des consultants extérieurs. L'opportunité pour des petites structures de mutualiser l’emploi d’un responsable QHSE est de nature à favoriser la bonne conception des plans. Cette dernière solution présente aussi l’avantage de déterminer une approche beaucoup plus globale intégrant démarche qualité, santé et sécurité des personnels, et contraintes environnementales. En somme, se préoccuper d’une responsabilité sociétale plus globale qu’une seule exigence ponctuelle, avec des retours bénéfiques pour les résidents.

 

Cependant, même si la méthodologie et les actions à mener sont acquises, la tâche à accomplir peut présenter un côté titanesque et chronophage. A titre d’exemple, le guide d’aide à l’élaboration du plan bleu en EHPAD consacre 29 pages aux principes à respecter et à la méthode à suivre, mais pas moins de 68 pages à de nombreuses annexes. Celles-ci constituent ainsi des modèles de procédures, de plans d’action, de tableaux de bord, de ressources de textes. L’appui d’une solution numérique peut alors procurer une aide précieuse : gestion électronique des documents, traçabilité, éléments de preuves (notamment en cas de contrôle ou d’audit), collecte et transmission de données, liens entre progiciels métiers existant, communication en temps réel entre pilotes et personnes concernées, information des autorités et des usagers, suivi des formations, d’éventuelles habilitations, des exercices et capitalisation des expériences .

 

Un plan bleu abouti permet de mettre en œuvre rapidement et efficacement des moyens et des instructions qui devraient minimiser l’impact d’une situation de crise en se rapprochant le plus possible d’un fonctionnement habituel. Des résultats récents d’une évaluation du ressenti des professionnels du secteur vis-à- vis de la « Culture de Sécurité en EHPAD» ont évoqué des obstacles à l’appropriation de cette culture. Ils sont liés principalement à des sous-effectifs et à des problématiques de procédures. Il est donc essentiel à l’avenir de trouver les moyens de développer cette culture, afin de répondre aux attentes de toutes les parties prenantes : résidents et familles, personnels et institutions.

 

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