Faut-il se laisser guider par les Bonnes Pratiques ?

Publié le -

AdobeStock_216624834

Si vous êtes investi dans le domaine de la qualité, de la sécurité, de l’hygiène, de l’environnement, ou encore dans celui de la responsabilité sociétale des organisations, il s'avère impossible que vous n’ayez pas été confronté au terme de “bonnes pratiques”. 

Quelles notions devrait-on y associer ? On vous propose des éléments de réponse.

Cette notion de portée internationale et très répandue (“good practices” en version anglophone)  traduit a minima des lignes directrices. Elle est en effet omniprésente, que ce soit dans les titres des documents de référence que vous utiliserez, normatifs ou pas, ou encore dans les commentaires qui les accompagnent. Voyons ce que recouvre le terme, l’usage qui en découle et son utilité.

 

Quels mots peut-on associer ? Recommandations, normes, chartes, avis, conseils, modèles, exemples, règles de l’art … Un peu tout ça en fait ! Mais finalement comment caractériser ce qui ne serait pas uniquement, et de manière très simpliste, une pratique qualifiée comme “bonne”. 

Posons nous les questions de base : Quoi ?  Pourquoi ? Comment ?

 

Qu’est-ce qu’une bonne pratique ?

 

Il est nécessaire de comprendre au préalable un objectif principal : Agir sur les comportements, sans pour autant utiliser le levier de la contrainte. L’incitation sera ainsi préférée, justifiée par des retours d'expérience légitimes, crédibles et dûment validés.

 

   " Pense avant de parler et pèse avant d'agir. "

William SHAKESPEARE (1564–1616)

 

De nombreuses organisations s’étant approprié avec succès cette notion peuvent être citées. Les descriptions respectives qu’elles produisent nous montrent la voie. Passons en revue quelques unes :

 

L’Organisation des Nations Unies (ONU) : Connue dans le milieu QHSE pour ses 17 objectifs de développement durable (ODD) et son agenda 2030, elle édicte des “recommandations” qui ne comportent cependant aucune obligation juridique directe pour les États qui en font partie.

 

Au sein même de l’ONU, la FAO (Food and Agriculture Organization) donne sa propre définition d’une bonne pratique : « … une pratique ayant fait ses preuves et permis d’obtenir de bons résultats, et qui est dès lors recommandée comme modèle. C’est une expérience réussie, testée et validée, au sens large, répétée, qui mérite d’être partagée afin qu’un plus grand nombre de personnes se l’approprient. » 

 

L'Union européenne : Elle adopte des actes dénommés également « recommandations ». Contrairement aux règlements et directives, elles ne sont pas contraignantes. et ont essentiellement une valeur politique. 

 

La Haute Autorité de Santé (HAS) : les bonnes pratiques sont décrites comme des “ … propositions développées méthodiquement pour aider le praticien et le patient à rechercher les soins les plus appropriés dans des circonstances cliniques données “. L’ objectif d’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins est clairement identifié. 

 

L’Inspection Générale de l’Éducation Nationale : D’origine managériale, le concept est défini ainsi : « […] une méthode … qui a été mise en œuvre et qui a amélioré les résultats de l’entité. Une bonne pratique est étayée par des données concrètes et vérifiables sur le lieu de son expérimentation »

 

Les Normes de l’Organisation internationale de normalisation (ISO) : De très nombreuses normes ISO contiennent le terme “bonnes pratiques" dans leur titre même ou bien dans leurs commentaires. On le retrouve notamment associé aux mots de guide, de code, d’exigences, de recommandations, d’exemples, etc … Le mot clef “bonnes pratiques" génère 677 résultats sur le site iso.org

 

Si on résume ces approches conjointes : une bonne pratique est donc une technique ou une méthode qui a été testée, évaluée par des données concrètes et vérifiables, qui a donné satisfaction et qui mérite d’être partagée. 

 

Une recommandation pourra aussi pallier l’absence de réglementation dans une phase transitoire. C’est le cas notamment pour répondre rapidement à l’émergence de phénomènes nouveaux ou bien à l’arrivée de techniques innovantes

 

On notera un usage très répandu dans les domaines de la santé et de l’hygiène.

 

Recommandé pour vous:

Découvrez le Top 3 des meilleures applications Qualité 2022


Pourquoi se référer à de bonnes pratiques ?

 

Confronté à une problématique, à un questionnement, se demander si on peut appuyer sa réflexion sur des références demeure un bon réflexe. Elles établissent des repères utiles. La notion bien connue, notamment des qualiticiens, de benchmark intervient alors. Tout en gardant à l’esprit des capacités d’innovation, cela peut éviter de réinventer des procédés existants et éprouvés, sources d’inspiration.

 

Il convient tout d’abord d’aller puiser du côté réglementaire. Il faut en effet vérifier si une obligation s’impose et si son non-respect entraînerait de possibles sanctions.

 

Ensuite, la recherche de documents d’application volontaire peut s’avérer fructueuse et c’est précisément là qu’interviendront les bonnes pratiques, les bien nommées. Peu importe leurs dénominations (voir plus haut : normes, recommandations …), elles constituent des ressources dont les conclusions devront être comparées avec les solutions recherchées. 

 

La frontière entre ces deux aspects, c’est à dire entre droit dur et droit souple, est cependant parfois ténue. Le Conseil d’État s’est d’ailleurs emparé de cette problématique au travers de jurisprudences et dans un volumineux rapport sur ce thème en 2013.

 

La plus haute juridiction administrative a ainsi proposé une distinction entre « recommandations de bonnes pratiques » (volontaires)  ou « règles de bonne pratique » (obligatoires), en fonction de leur nature juridique. On peut néanmoins retenir qu’en matière de responsabilité, et en l’absence de textes obligatoires et contraignants, il arrive au juge de s’en remettre à des documents d’application volontaire. Ce constat appelle à la prudence.

 

Le domaine de la santé est particulièrement concerné par ces cas de figures. Ainsi, le Conseil d'État a acté le fait qu'une recommandation de bonne pratique puisse être opposable, car assimilée aux données acquises de la science dont le médecin et les professionnels de santé doivent tenir compte dans leur pratique auprès des patients. 

 

Enfin, rappelons que le pouvoir réglementaire s'appuie parfois sur le droit souple pour en rendre le contenu… obligatoire. Citons par exemple les règles auxquelles doivent se conformer les pharmacies à usage intérieur des services départementaux d’incendie et de secours, basées sur un guide de bonnes pratiques acté par arrêté.

 

La contrainte peut même aller jusqu’à une exigence formalisée : mise en place, par décret, d’un référentiel de bonnes pratiques, dans le but de reconnaître les prestataires de service et distributeurs de matériels de santé, avec une obligation de certification par un organisme tiers.  

 

Il y a donc tout lieu de s’intéresser aux bonnes pratiques sous toutes leurs formes. Elles peuvent constituer une simple aide pour accompagner la mise en place d’un processus ou d’une action, mais elles peuvent aussi, en les ignorant, engager des responsabilités  

 

Comment construire de bonnes pratiques ?

 

Reconnaître de bonnes pratiques, c’est indéniablement s’inscrire dans une démarche d’amélioration continue, et, le cas échéant, le faire savoir. Elles sont élaborées au vu des connaissances actuelles et des règles de l’art associées. Sans pour autant prétendre à être reproductible pour tous et dans tous les cas de figures, elles contribuent à la volonté des organisations de s’améliorer et d’être performantes.

 

La compilation de sujets convergents peut être réalisée (au travers de guides, de codes, de bibliothèques …), mais il ne s’agit jamais d'une solution “clefs en main”, systématiquement reproductible.

 

La reconnaissance d’une pratique vertueuse peut également passer par un prix. C’est ainsi que l’Association France Qualité Performance attribue annuellement, parmi d’autres titres, un prix des bonnes pratiques ( avec une évaluation des candidats basée sur le modèle EFQM®). 

 

Finalement, qu'est-ce qui fait qu’une bonne idée, qu’une intuition, peut se transformer en une bonne pratique ? Le  terreau idéal est constitué par une approche participative. Il y a lieu d'associer aux réflexions les parties prenantes concernées, à commencer par les concepteurs potentiels et surtout les acteurs chargés d’une future mise en œuvre opérationnelle. Besoin et expérience seront croisés.

 

Une bonne pratique sera reconnue comme telle dès lors qu’elle aura fait ses preuves. Elle  devra faire consensus au sein d’un  milieu concerné, d’une filière de métiers. Elle devra avoir  été testée, analysée et avoir permis d‘obtenir les résultats escomptés. L’adhésion des acteurs demeure primordiale, d’où la nécessité de les associer en amont.

 

Une bonne pratique devra être régulièrement évaluée pour lui conférer un caractère durable, au travers d’audits internes par exemple. Son aspect évolutif sera pris en compte afin qu’elle demeure adaptée en permanence au contexte. Avoir recours à des recommandations, c’est agir en connaissance de causes, et c’est aussi se prémunir d’effets indésirables déjà recensés.

 

  " Mesurer, c’est savoir. "

 "  Si vous ne pouvez pas le mesurer, vous ne pouvez pas l’améliorer. "

William THOMSON, Lord KELVIN (1824–1907)

 

La difficulté éventuelle d’évaluer et de comparer rigoureusement des actions, jugées essentielles pour la Société, posera les limites au simple recours à des lignes directrices volontaires. Telle est la circonstance qui pourrait, par exemple, conférer prochainement au reporting extra-financier des entreprises un caractère obligatoire plus large qu’à ce jour.

 

Des critères de réussite ? Hormis le fait que la pratique ciblée devra s'avérer utile, utilisable et utilisée, on peut définir quelques points essentiels à respecter afin de ne pas fragiliser sa mise en oeuvre : 

 

  • vérifier l'absence d’incompatibilité avec des mesures d’ordre réglementaire
  • adapter le comportement des destinataires en suscitant leur adhésion 
  • ne pas  imposer de contraintes fortes
  • structurer et formaliser l'élaboration des documents de référence
  • s’assurer de leur large diffusion
  • surveiller leur cycle de vie (amélioration continue)

 

Sécuriser une bonne pratique, c’est donc lui garantir en toute transparence : légitimité, effectivité et efficacité.

 

Toutes les références issues du droit souple (celui qui ” incite, recommande, oriente “) ne constituent pas un aveu de faiblesse du droit dur (celui  qui “ ordonne, prescrit ou interdit “). Au contraire, les deux approches sont complémentaires, harmonieuses et répondent à des besoins différents. Au vu de leurs caractéristiques, se laisser guider par les bonnes pratiques relève donc, potentiellement, de … bonnes pratiques ! 


En savoir plus

> Pour aller plus loin dans la mise en place des bonnes pratiques qualité dans le cadre de la gestion de votre SMQ, découvrez le Top 3 Applications Qualité de Bluekango

Nouveau call-to-action