Devoir de vigilance, quelles règles pour les entreprises ?

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Garantir de bonnes conditions de travail, maîtriser l’impact environnemental de ses activités et contribuer au développement économique durable et local sont des principes clefs de la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE). Au pied du mur, les entreprises ne peuvent plus faire semblant et doivent engager des démarches pour contribuer à l’effort collectif et rester compétitives. Le devoir de vigilance s’inscrit dans cette dynamique, imposant aux entreprises les plus influentes de répondre de leurs actes et assumer les réparations nécessaires lorsque celles-ci ont un impact négatif.

Alors de quoi parle-t-on précisément ? Quelle est son origine ? 

Quelle réglementation encadre le devoir de vigilance ? 

Voici quelques éléments de réponse.

 

Le 24 avril 2013, à Dacca, capitale du Bangladesh, un immeuble du Rana Plaza s'effondre causant la mort de 1138 personnes, des femmes pour la plupart et faisant plus de 2 000 blessés. Cet accident impactant 6 usines textiles est l'accident industriel le plus meurtrier au monde. 

 

Mais pourquoi cet accident a-t-il marqué un point de rupture en France et en Europe ? Tout simplement parce que les ateliers textiles présents étaient sous-traités par de grandes marques européennes qui aujourd’hui n'acceptent plus que les salariés embauchés ou sous-traités travaillent dans des conditions indécentes ou dangereuses.

 

Le devoir de vigilance, de quoi parle-t-on ?

 

Face à l’indignation et suite à une prise de conscience collective, aidée par des mobilisations d’Organisations Non Gouvernementales (ONG), la France à adopté le 27 mars 2017, près de 4 ans après l’accident, une loi sur “le devoir de vigilance des sociétés mères et entreprises donneuses d’ordre “.

 

Son but : prévenir les « atteintes graves envers les droits humains et les libertés fondamentales, la santé et la sécurité des personnes, ainsi que l’environnement » et y donner réparation en cas de violation. On parle également de “devoir de diligence”.

 

L’article L. 225-102-4.-I du code du commerce stipule que le devoir de vigilance concerne “Toute société qui emploie, à la clôture de deux exercices consécutifs, au moins cinq mille salariés en son sein et dans ses filiales directes ou indirectes dont le siège social est fixé sur le territoire français, ou au moins dix mille salariés en son sein et dans ses filiales directes ou indirectes dont le siège social est fixé sur le territoire français ou à l'étranger”.

 

Ces entreprises doivent alors mettre en place un “plan de vigilance”.

Toujours d’après le texte de loi, “le plan comporte les mesures de vigilance propres à identifier les risques et prévenir tout manquement aux exigences du texte”.

 

Ce plan est encadré par la loi et doit présenter plusieurs données telles que :

 

  • Une cartographie et une analyse des risques ;
  • Une évaluation régulière des filiales, des sous-traitants et des fournisseurs vis-à -vis de la cartographie des risques ; 
  • Un plan d’actions correctives au regard des risques identifiés ; 
  • Un mécanisme d’alerte et de recueil des signalements des risques ; 
  • Un dispositif de suivi des mesures mises en œuvre et d'évaluation de leur efficacité.

 

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Qu’est ce que cela implique ?

 

Les entreprises soumises au devoir de vigilance doivent alors publier publiquement le compte rendu de sa mise en œuvre effective. C’est notamment le cas du Groupe Rocher qui publie annuellement sur son site web son plan de vigilance.

 

Lorsqu’une société est mise en demeure dans le cadre du plan de vigilance, cette dernière a un délai de trois mois pour le publier.

 

Souvent jugés incomplets, des associations et Organisations Non Gouvernementales comme Amnesty International dénoncent publiquement certaines entreprises aux plans de vigilances trop succincts et incomplets et demandent aux pouvoirs publics de renforcer les contrôles en entreprise pour assurer un réel suivi.

 

Les associations de défense des droits de l’homme et de l’environnement, les syndicats et les victimes elles-mêmes peuvent porter en justice une société qui ne diffuserait pas son plan de vigilance ou qui ne le respecterait pas. Le juge pourra alors mettre en demeure la société de mettre en place un plan de vigilance ou apporter les réparations nécessaires en cas de problème.

 

A ce titre, en décembre 2022, s’est tenu le premier procès sur le devoir de vigilance au tribunal judiciaire de Paris, opposant six ONG à la société Total Energies dans le cadre de son projet pétrolier en Ouganda.

 

Quelles évolutions ?

 

Pour aller plus loin dans la démarche, l’Union Européenne souhaite que “les entreprises déploient des processus complets visant à atténuer les incidences négatives sur les droits de l’homme et l’environnement dans leurs chaînes de valeur, intégrer la durabilité dans leurs systèmes de gouvernance et de gestion d’entreprise, et élaborer leurs décisions commerciales au regard des incidences sur les droits de l’homme, le climat et l’environnement, ainsi qu’au regard de la résilience de l’entreprise sur le long terme.”

 

En ce sens, la proposition de Directive du parlement européen et du conseil du 23 février 2022 sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité stipule que “le comportement des entreprises dans l’ensemble des secteurs économiques est essentiel pour réussir la transition de l’Union vers une économie verte et neutre sur le plan climatique, conformément au pacte vert pour l’Europe, et pour atteindre les objectifs de développement durable des Nations unies, notamment les objectifs liés aux droits de l’homme et à l’environnement.”

 

Inspirés de la loi française, la directive européenne prévoit un champ d’application progressif, en commençant par les entreprises de plus de 1000 salariés et 300 millions d’euros de chiffre d’affaire, puis les entreprises de plus de 500 salariés et réalisant un chiffre d’affaires annuel supérieur à 150 millions d’euros au niveau mondial. Le seuil sera abaissé à 250 salariés avec un chiffre d’affaires annuel de plus de 40 millions d’euros dans le cadre de certains secteurs à risques comme l’industrie textile, l’agriculture ou les extractions de minerais.

 

Cette proposition de directive qui met l’accent sur l’intervention des fournisseurs et des sous-traitants, vient en complément de la Directive Européenne sur la publication d’informations non financières (Directive NFRD) imposant à environ 12 000 entreprises la mise en place d’indicateurs Environnementaux, Sociétaux et Environnementaux (ESG).

 

L’opinion publique de plus en plus sensible à la qualité de vie et aux impacts de la société sur l’environnement, la sécurité physique et psychologique et la santé publique, impose indirectement aux gouvernements et aux entreprises de maîtriser ou de réparer l’impact négatif qu’ils peuvent avoir. La réglementation évolue en ce sens afin d’accompagner la transition vers une économie plus verte et plus respectueuse des conditions de travail. Aujourd’hui des outils existent pour anticiper ces réglementations et s’autoévaluer sur ses performances RSE, ESG et tout autres critères impliqués dans le “devoir de diligence” des entreprises.


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