Vous avez dit : “Lignes Directrices ?”

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Comme dans d’autres domaines, l’univers QHSE n’a pas échappé à l’émergence du terme “lignes directrices”. Présent dans de nombreux intitulés de normes internationales ISO, il y est traduit en anglais par “Guidelines” et par “Directrices” en Espagnol. Qu’entend-on exactement par ce libellé ? 

 

Nous allons nous intéresser à ce que recouvrent ces “lignes” qui ne constituent sûrement pas une unique fantaisie sémantique. En géométrie, une ligne directrice est une ligne qui détermine le mouvement d'une autre ligne. Au sens figuré, il s’agit d’une politique que l’on impose ou que l’on suggère d’appliquer. 

 

Ce sens, issu du droit dit “souple”, utilise une part de vocabulaire liée à l'orientation dans l’espace, ou à la navigation, pour imager les orientations stratégiques d’une organisation : direction, sens, cap, orientation, axe, feuille de route, plan, ligne de conduite…Pas de doute, cela répond à une question légitime succédant à  “Où va-t-on ?” ; Comment ? 

 

Le domaine QHSE n'échappe pas à cette tendance car on y trouve de nombreuses références en matière de recommandations, d’application volontaire, pour respecter des stratégies établies.    

 

Les domaines utilisant des “ lignes directrices “

 

Signe que les questions auxquelles répondent de telles lignes sont fondamentales pour une organisation, on retrouve ce concept dans de nombreux domaines.

 

En droit administratif français, pour éviter une possible confusion avec les directives européennes, les lignes directrices ont remplacé l’ancien terme de “directives” employées par les administrations. 

 

La Loi n°2019-828 du 6 août 2019 dite de transformation de la Fonction Publique a rendu obligatoire pour toutes les collectivités territoriales de définir des “ lignes directrices de gestion “ pour les emplois, les effectifs et les compétences.

 

Toujours en 2019, la Loi PACTE a permis aux entreprises de se doter d’une “raison d’être” intégrant la prise en compte des conséquences sociétales et environnementales de leurs activités. La performance économique et la contribution à l'intérêt général sont ainsi rassemblées. Les objectifs sont définis dans les statuts des entreprises concernées et s'accompagnent idéalement des orientations pour les atteindre.

 

En matière de médias et de communication, les lignes éditoriales définissent des choix rédactionnels, en phase avec les identités de ces structures.

 

Les responsables de systèmes d’information évoqueront souvent des “schémas directeurs”. Ils constituent des outils prospectifs, évolutifs, définissant des objectifs et la programmation de leur réalisation dans le temps.

 

Enfin, dans le domaine normatif international ISO, les exemples de titres de normes associées à des systèmes de management sont nombreux, notamment en matière de QHSE. 

 

Voici quatre exemples parmi de nombreux autres :

 

ISO 9004:2018

Management de la qualité — Qualité d'un organisme — Lignes directrices pour obtenir des performances durables

 

ISO 31000 : 2018 « Management du risque – Lignes directrices » établit les principes et le processus de management du risque, l'appréciation et le traitement du risque.

 

ISO 45001:2018

Systèmes de management de la santé et de la sécurité au travail — Exigences et lignes directrices pour leur utilisation

 

ISO 14005:2019

Systèmes de management environnemental — Lignes directrices pour une approche souple de la mise en oeuvre par phases

 

Et quand le terme est absent du titre d’une norme, on peut le retrouver dans les commentaires de l’organisme international :

 

  ISO 26000 (Responsabilité Sociétale), ce sont des lignes directrices pour tous ceux qui ont conscience qu’un comportement socialement responsable et respectueux de l’environnement est un facteur clé de la réussite.

 

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Donner un cap et peut-être plus !

 

Ainsi, une ligne directrice va donner des indications, des explications sur la manière de réaliser quelque chose. On peut, à ce stade, évoquer l’expression “ l’art et la manière “, ou “ comment arriver à ses fins “. Des principes sont exposés, eux-mêmes qualifiés de “directeurs”. Ils ne revêtent pas de caractère obligatoire et restent purement incitatifs.

 

En droit administratif, la ligne directrice a vocation à apporter un éclairage sur des textes réglementaires, avec cependant une part d’ambiguïté liée à leur caractère interprétatif. Des recours sont d’ailleurs désormais recevables. 

 

Notons également que des directives européennes peuvent elles-mêmes être commentées par des lignes directrices. C’est le cas par exemple pour les rapports de développement durable des entreprises assujetties à cette obligation (CSRD = « Corporate Sustainability Reporting Directive »). Cela vise  les  publications d'informations non financières du domaine environnemental et social (2017) ou bien celles relevant du climat (2019).

 

La métaphore du fil d’Ariane de la mythologie grecque est toute proche. Telle une ligne guide, cette dernière peut permettre de s'orienter et de sortir d’une situation complexe (avec ou sans Minotaure et labyrinthe). 

 

L’exercice a donc ses limites car prescrire des recommandations détaillées pourrait aussi être assimilé à un aveu de manque de clarté du texte originel. Celui-ci aurait donc un besoin impératif d’être commenté, “décortiqué“. Il faut relativiser cette crainte car des situations spécifiques peuvent nécessiter cette forme d’accompagnement pour ceux chargés de la mise en œuvre : manque d’expérience, prise de fonctions récente, nécessité d’application d’un protocole strict ou d’une uniformité d’actions.

 

En ce sens, les lignes directrices peuvent également être considérées comme un recensement et un partage de " bonnes pratiques “, pour peu qu’elles aient été testées, évaluées et validées. L’exemple des normes ISO du domaine QHSE illustre cette approche et peut aussi déboucher sur une exigence formalisée par les parties prenantes.

 

Cependant, au-delà de l’aspect purement normatif (d’application volontaire), l’autonomie que l’on peut susciter et accorder à ses collaborateurs sera parfois de nature à alléger le volume des recommandations. Il s’agira alors d’une posture plutôt managériale.

 

Un leadership novateur et engagé 

 

  Ne dites jamais aux gens comment faire les choses. Dites-leur ce qu’il faut faire et ils vous surprendront par leur ingéniosité.

 Général George S. Patton

 

Donner un cap, un objectif à atteindre reste essentiel (le " Quoi ? "). Idéalement, et pour donner du sens aux actions, leur raison d’être (le “ Pourquoi ? “) devra également être clairement explicité aux personnes chargées d’agir. Cela donne de la visibilité sur les ambitions de l’organisation et sur les orientations stratégiques. Pour le “ Comment ? “, il est possible d’adopter une attitude beaucoup moins directive qui permet aussi de développer une forme de réflexion collective et participative. Cela contribue activement à améliorer l’autonomie et la responsabilisation des collaborateurs.

 

Nota : Le modèle EFQM 2020 (European Foundation for Quality Management) a adopté ce triptyque comme piliers avec trois critères d’excellence  = l'orientation, les opérations et les résultats (Pourquoi ? Comment ? Quoi ?).

 

La mobilisation du leadership est primordiale pour mettre en place cette approche qui sera souvent novatrice, voire disruptive.

 

Pour David Marquet, ancien commandant de sous-marin nucléaire et auteur de l’ouvrage “ Renversez la vapeur ” (titre originel : “ Turn the ship around ”), les lignes directrices sont plutôt assimilées à des valeurs ou à des engagements adoptées par une organisation.  Reflet exact du fonctionnement réel de la structure, elles ont alors un but principal : guider les décisions des collaborateurs qui, investis d'une forte autonomie et de compétences acquises, font part de leurs intentions pour atteindre un objectif fixé. 

 

Mettre à l’honneur un collaborateur efficace peut alors se faire en faisant un lien entre ses actions et  les valeurs définies. Les lignes directrices peuvent donc constituer tour à tour des modes d’emploi ou des repères afin de rester, dans tous les cas, alignés avec la stratégie globale et la raison d’être d’une organisation.

 

Or, combien même un pilote performant sait quelle est la destination à atteindre et qu’il choisit lui-même un trajet non imposé, il ne se dirige pas sans instruments de mesure. En disposer sera donc d’une aide décisive.



Tel le navigateur passé des étoiles au sextant, puis au guidage par satellite, le pilotage de la performance des organisations peut désormais compter sur des outils digitaux. Gain de temps estimable, favorisant le partage d’informations, la digitalisation des processus devient donc un allié de premier choix. Il ne faudra cependant pas oublier que, pour rester robuste, il faut être capable aussi de maintenir un fonctionnement en mode dégradé. Un bon marin expérimenté saura se diriger sans GPS !



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