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ESRS 1&2 : De la définition des enjeux ESG à l’analyse de double matérialité

Rédigé par Jean-Marc BRIAND | 22/10/2024

L’entrée en vigueur de la directive CSRD impose désormais aux entreprises de revoir leur démarche RSE, non seulement avec des indicateurs de performance pour les comparer entre elles, mais aussi en lien avec la comptabilité afin de redoubler de transparence vis-à-vis des données relatives à leurs performances Environnementales, Sociales et liées à la Gouvernance (enjeux ESG). Une grande quantité de données doit être collectée et analysée pour mettre en œuvre un programme d’amélioration continue en commun accord entre l’entreprise elle-même et ses parties prenantes. Un travail stratégique et collaboratif doit donc être mené pour comprendre les attentes de chacun et dresser les enjeux dit “matériels”, prioritaires dans le développement de l’entreprise.

 

Comment définir les enjeux ESG de l’entreprise ? Quelles étapes sont nécessaires pour répondre aux exigences des ESRS 1&2 ? Voici nos réponses pour s’engager dans une démarche CSRD solide.

 

Au-delà de la réponse aux exigences de la réglementation, la mise en place de la démarche CSRD questionne et demande généralement une restructuration de la stratégie. Pour vous guider dans sa mise en œuvre, suivez les étapes clefs présentées dans cet article.

 

Comment initier la démarche CSRD ?

La politique CSRD doit être soutenue et guidée par la Gouvernance. Conseil d’Administration, Conseil de surveillance, Comité de Direction sont les premières instances impliquées dans la définition d’une stratégie basée sur la durabilité, et leur implication profonde permettra de renforcer la résilience, l'innovation et la compétitivité de votre entreprise à long terme, mais également de fidéliser et d’engager les parties prenantes et donner confiance aux investisseurs.

Les 4 étapes suivantes représentent le socle de la démarche. 

 

Étape 1 : Identification et évaluation des enjeux 

Identifier les enjeux de l'entreprise est une étape cruciale dans l'élaboration d'une stratégie de Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) qui a généralement été déjà réalisée par le comité RSE. Cette identification permet de cibler les domaines où l'entreprise peut avoir le plus d'impact et où elle doit concentrer ses efforts. Voici les étapes pour identifier les enjeux de l'entreprise :

 

Réaliser un Benchmarking sectoriel et consulter les référentiels existants

Il est tout d’abord nécessaire d’étudier les labels et standards qui constituent une première base afin d’alimenter la réflexion sur l'identification de ses enjeux. Certains comme l'ISO 26000, le Global Reporting Initiative - le GRI, les ODDs, etc. peuvent servir de base théorique pour identifier les enjeux et répondre favorablement aux exigences des ESRS.

 

Il est également possible de s'appuyer sur un benchmark sectoriel et des labels Cette pratique permet de comparer les pratiques de l'entreprise avec celles des leaders du secteur pour identifier les meilleures pratiques et les domaines où l'entreprise peut progresser.

 

Réaliser une étude du contexte de l'entreprise

En parallèle, il est également recommandé de réaliser une analyse SWOT/PESTEL afin d’examiner les facteurs politiques, économiques, socioculturels, technologiques, environnementaux et légaux qui peuvent influencer les activités de l'entreprise et déterminer les enjeux pertinents.

 

Cette analyse peut également être assortie d’une analyse concurrentielle en vue d’étudier les pratiques et les stratégies RSE des concurrents et identifier les tendances du secteur et les attentes communes.

 

Étape 2 : Consultation des Parties Prenantes

La consultation des parties prenantes est une étape essentielle pour comprendre leurs attentes, préoccupations et leurs priorités (enjeux matériels) en matière de Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE). 

 

Identification des Parties Prenantes


L’identification des parties prenantes va se dérouler en deux phases :

  • Une cartographie des parties prenantes internes et externes pertinentes. Cela inclut les employés, les clients, les fournisseurs, les actionnaires, les communautés locales, les régulateurs, les ONG, les médias, etc.
  • La classification de celles-ci en fonction de leur niveau d’influence et d’intérêt sur les activités de l'entreprise.

Préparation de la Consultation

La consultation des parties prenantes doit être préparée en amont avec : 

  • L'échantillonnage et la sélection des parties prenantes à consulter par classe. 
  • La définition d’objectifs clairement identifiés : identifier les attentes, évaluer les impacts, recueillir des idées, etc..
  • Le choix des méthodes de consultation appropriées en fonction de l'importance de chaque partie prenante et des objectifs : enquêtes, interviews, groupes de discussion, ateliers participatifs, forums en ligne, etc.

Réalisation de la Consultation

La consultation des parties prenantes se déroule en trois phases :

  • Conception des outils de consultation : Il peut s’agir de questionnaires, de guides d'entretien ou de supports de présentation pour des ateliers. Les questions doivent être claires, ouvertes et pertinentes.
  • Planification logistique nécessaire pour la consultation : réservation de salles, outils technologiques pour les consultations en ligne, etc.
  • Communication sur la consultation afin d’informer les parties prenantes de l’objectif, de l’importance et du déroulement de la consultation. La communication doit être transparente et ouverte.

 

Mise en Œuvre de la Consultation

La mise en œuvre de la consultation peut se présenter sous plusieurs formes :

  • La réalisation d’enquêtes et interviews en ligne ou par courrier, en menant des interviews individuelles ou de groupe. Il est important de s'assurer de la diversité et de la représentativité des participants.
  • L’animation de groupes de discussion et ateliers afin de recueillir des opinions et des idées de chacun. Des techniques de brainstorming et des exercices participatifs pour engager les participants peuvent être utilisés.
  • Le recueil de commentaires sur des plateformes en ligne et les réseaux sociaux pour obtenir des commentaires de manière continue et inclusive.

 

Synthèse et analyse des Données

La synthèse et l’analyse des données est une étape décisive dans l’identification des enjeux matériels des parties prenantes. Le besoin ici est :

  • De compiler et organiser les données recueillies à partir des différentes méthodes de consultation.
  • D’analyser les résultats en identifiant les thèmes récurrents, les préoccupations majeures, et les attentes clés. Il est possible d’utiliser des outils d’analyse qualitative et quantitative pour interpréter les données.
  • De synthétiser les informations et formaliser un rapport des résultats de la consultation, en mettant en évidence les priorités des parties prenantes.

Communication des Résultats et Retour d'Information

La CSRD met l’accent sur la communication et la transparence de l’information. Cette dynamique s’applique également dans les étapes opérationnelles. Il est nécessaire de :

  • Partager les résultats de manière transparente avec les parties prenantes. Il est possible de s’appuyer sur des rapports, des réunions de restitution, et des plateformes en ligne…
  • Obtenir des feedbacks pour s’assurer que les résultats reflètent fidèlement les préoccupations et attentes des parties prenantes.
  • Intégrer les feedbacks pour ajuster les priorités et le plan d'actions.

 

En adoptant cette approche structurée, une entreprise peut réaliser une consultation des parties prenantes efficace, ce qui permettra de développer une stratégie RSE bien informée. On peut alors produire une matrice de simple matérialité.

 

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Étape 3 : L’analyse de simple matérialité

 

À partir des informations collectées, l'entreprise effectue une analyse de simple matérialité pour repérer les enjeux ESG les plus significatifs. Cela impose de croiser l'importance des enjeux RSE pour les parties prenantes avec celle définie par la gouvernance. En interne, chaque enjeu sera évalué en fonction de son impact potentiel sur l'entreprise (en termes de risques, opportunités, performance financière et réputation). Les résultats de l’analyse seront formalisés dans une matrice de simple matérialité, qui est la première étape avant d’aller à la double matérialité qui est l’exigence de la CSRD et permettra ensuite de faire sa Gap analysis et de bâtir un plan d’actions stratégique RSE CSRD.

 

Matrice de simple matérialité - BlueKanGo

 

Les enjeux dits “matériels” pour l’entreprise et les parties prenantes se situent alors dans la “zone rouge”, définissant ainsi les priorités d’actions identifiées par les parties prenantes et confirmées par la gouvernance. Selon la politique RSE de l’entreprise et les résultats obtenus, certains enjeux nécessiteront une action immédiate et alors que d'autres pourront être traités à plus long terme dans le cadre de la CSRD.

 

Étape 4 : L’analyse de double matérialité

L’analyse de double matérialité est plus complète et plus exigeante que l’analyse de simple matérialité. En plus d’une matérialité d’impact, c'est-à-dire l’impact des activités de l’entreprise sur l’environnement et la société, l’analyse de double matérialité prend en compte la matérialité financière, c'est-à dire l’impact des enjeux environnementaux et sociétaux sur la performance économique de l’entreprise. Elle constitue le socle de la mise en œuvre de la CSRD et, au-delà de la conformité, la mise en œuvre d'une stratégie RSE intégrée et pilotée.

 

La matérialité Financière (ou Matérialité Externe)


La matérialité financière s'intéresse à la manière dont les facteurs ESG peuvent affecter la valeur de l'entreprise, ses coûts, ses revenus, son actif et son passif.

 

Elle amène à identifier les risques et opportunités financiers en matière de durabilité de l’entreprise, y compris ceux qui découlent des dépendances à l’égard des ressources (naturelles, humaines et sociales).

 

Par exemple, comment le changement climatique peut entraîner des coûts supplémentaires pour l'entreprise en raison de régulations plus strictes, de risques physiques ou de changements dans les préférences des consommateurs.

 

La matérialité d’impact (Environnementale, Sociale et/ou Sociétale)


Cette matérialité évalue l'impact de l'entreprise sur l'environnement, la société et l'économie. Elle examine comment l'entreprise affecte l’environnement ou la population, via ses propres activités ou celles de sa chaîne de valeur en amont et en aval, et à travers ses relations d’affaires.

 

Par exemple, comment les émissions de carbone de l'entreprise impacte le changement climatique ou comment ses pratiques de travail affectent le bien-être des employés.

 

Pour ce faire on évalue donc trois dimensions de l’impact :

  • La qualité de l’impact : Un impact peut être positif ou négatif.
  • Le type d’effet : Un impact peut être réel (déjà constaté dans le passé ou peut se produire avec certitude) ou potentiel, c'est-à-dire qu'il est susceptible de se produire dans le futur.
  • L’importance de l’impact : un impact est évalué selon sa gravité et sa probabilité d'occurrence.  

 

Dans le cas où l’impact est négatif, la gravité est déterminée selon trois critères : son ampleur, son étendue et sa remédiabilité.

 

Dans le cas d'un impact positif, la remédiabilité n'est pas évaluée. 

 

D’autres part, dans le cas d’un impact négatif affectant les droits de l’Homme, la gravité de l’impact prime sur sa probabilité.

 

L’importance de la Double Matérialité

 

Bien réaliser son analyse de double matérialité est fondamental pour plusieurs raisons :

  • C’est un outil de transformation stratégique qui permet d’identifier les Impacts, Risques et Opportunités (IRO) qui découlent des enjeux Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance (ESG). L'analyse oriente la stratégie des entreprises en priorisant les sujets les plus importants, avec deux objectifs : réduire ses impacts négatifs et son exposition aux risques, et maximiser ses impacts positifs et ses opportunités. 
  • C’est un moyen de répondre aux attentes croissantes des parties prenantes (salariés, clients, investisseurs et financeurs, etc.) qui demandent une plus grande transparence et une meilleure prise en compte des enjeux de durabilité par les entreprises.
  • C’est une obligation réglementaire pour les entreprises soumises à la directive CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive), depuis le 1er janvier 2024. La CSRD impose de publier un rapport de durabilité qui s’appuie sur les standards de reporting européens (ESRS), dont la sélection repose sur les enjeux évalués comme importants d'après l'analyse de double matérialité.

 

Matrice de double matérialité - BlueKanGo

 

Étape 5 : Suivi d’indicateurs et formalisation d’un rapport de matérialité

 

La mise en place d’indicateurs de performance sert de levier d’amélioration continue et de base de travail pour déployer et faire évoluer la stratégie d’entreprise et la démarche RSE.

 

Le rapport de matérialité qui sert de support de communication auprès des parties prenantes internes et externes pour garantir la transparence et obtenir des feedbacks supplémentaires. Il présente le processus d'analyse de matérialité, les résultats et les priorités définies.

 

Le processus d’identification des enjeux RSE/ESG n’est pas figé dans le temps, il requiert un suivi et des ajustements régulier pour s’assurer que l’analyse de matérialité reste pertinente face aux évolutions internes et externes.

 

La mise en œuvre d'une démarche RSE conforme aux exigences de la directive CSRD ne se limite pas à une simple formalité administrative. Elle exige une réflexion stratégique profonde, une consultation active des parties prenantes, et une analyse rigoureuse des enjeux ESG. En suivant les étapes clés – identification des enjeux, consultation des parties prenantes, analyse de matérialité, suivi des indicateurs – les entreprises peuvent structurer une démarche RSE solide, alignée à leurs priorités et celles de leurs parties prenantes. Ce processus dynamique permet non seulement de renforcer la transparence et la conformité, mais aussi d’améliorer les performances à long terme en matière de durabilité.

 

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